Editorial d’IsraelValley. De Daniel Rouach. (Rédacteur en Chef). Ce matin je suis dans un hôpital de la région sud de Tel-Aviv, le Centre médical Assaf Harofeh (1) , proche de l’aéroport Ben Gourion. Vendredi dernier j’ai été me faire tester avec une rapidité étonnante à Tel-Aviv. Une recherche sur le site des Assurances israéliennes m’avait fait savoir que dans mon avion El Al (Paris-Tel-Aviv), quatre malades du coronavirus se sont déclarés. J’ai perdu l’odorat après deux-semaines.

Les résultats sont tombés hier après-midi. Un appel très officiel, et tout en douceur, du Maguen David Adom. J’ai bien le coronavirus. Rien de dramatique. Je m’y attendais. Les signes étaient là. A partir de ce matin, je vous transmettrai mon expérience israélienne. Hier je n’en ai pas eu la force.

Hier a été une journée très, très spéciale. Vers 20 heures, une ambulance silencieuse et sans flashs d’urgence du Magen David Adom m’a récupéré. L’atmosphère était lunaire. Le conducteur était seul et habillé avec une blouse et des lunettes totalement hermétiques. Je n’ai pas pu voir son visage. Sa voix était jeune. Très style « militaire ». J’avais l’impression qu’il travaillait pour l’armée israélienne.

Un moment assez incroyable, où l’on passe d’une vie « classique » à une autre vie. En Israël, le style est humain et très direct. Pas de place pour le blablabla. Le conducteur me demandait toutes les cinq minutes si tout va bien. Devant l’hôpital, dans la nuit sombre et silencieuse l’ambulance s’est garée. Je suis sorti. Assommé!

J’ai été transporté dans une annexe de l’hôpital qui recevait habituellement des retraités israéliens. 16 personnes sont dans ce mini-hôpital, style résidence spartiate fermée. Ce qui frappe le plus : les médecins communiquent à travers une salle vidéo et ne sont pas en contact physique avec les malades. Tout se passe via écran.

De temps à autre un micro grésille et donne, toujours dans un style militaire, en hébreu,  un  prénom. Tout le monde entend « la voix ». L’installation où je me trouve est bourrée de caméras vidéos. Tout est sous-surveillance. Impossible de sortir à l’extérieur. Tout est verrouillé à double tour.

Chacun a son téléphone portable et porte en permanence un masque. Le plus extraordinaire : une entraide de style familiale existe vraiment entre les seize malades.

Une expérience unique de voir des jeunes américains de Duke University (environ 30 ans) aider des personnes de 70 ans qu’ils ne connaissaient pas la veille. Chacun apporte son savoir-faire de manière naturelle. Un jeune médecin chirurgien-ophtalmologue est dans le groupe des « 16 ». De manière naturelle il est devenu mon médecin bénévole. Je le questionne sans arrêt. Un dialogue en Anglais. Des personnes se chargent de ranger les tables et le frigo. Un juif orthodoxe est penché en permanence sur un livre du Talmud.

Tout est en accès libre : café, lait, gâteaux, pizzas, houmous…

Le matin une porte s’ouvre : deux employés couverts d’une robe médicale, de l’hôpital, livrent un chariot. C’est aux malades de prendre la suite. Et d’organiser le petit-déjeuner. Aucune tristesse. Aucune lassitude. Juste quelques mots entre les « 16 ». Une femme de ménage a pénétré les locaux ce matin. Un jeune américain l’a aidé amicalement à récupérer les poubelles. Il l’a aidé à déplacer chaises et tables.

L’hôpital me livre un sac toilette complet. Mon nom y est inscrit en hébreu. Un geste inoubliable. On me transmet un thermomètre. Chaque prise de température est une épreuve. Chacun est appelé par les infirmiers. Les tests au coronavirus démarrent. Chacun avec son angoisse.

J’oubliai de vous dire: beaucoup de gens toussent. Une vielle dame américaine va mal. Elle me demande d’appeler les médecins en urgence. C’est ce que je fais. Elle a peur. Au même moment une annonce grésille : « des glaces à la vanille pour tous ». Je traduis en hébreu, Français, Anglais. Applaudissements! Mon nouvel ami, juif orthodoxe à la longue barbe, me demande si les glaces sont cashers. Je lui répond par un tonitruant « Qen » (« oui »). Il est heureux… moi aussi. Les petits plaisir de la vie… en période de coronavirus.

(1) Le Centre médical Assaf Harofeh est le quatrième plus grand hôpital public en Israël. Le centre médical est situé à Be’er Ya’akov. L’hôpital est un établissement médical universitaire de 848 lits qui dessert une population croissante de toutes les nationalités, ce qui représente actuellement près d’un demi-million de personnes. L’hôpital offre des services à une population d’environ 1,5 million d’habitants et offre une grande variété de services de soins de santé de premier ordre.

Le centre médical comprend 848 lits pour les patients hospitalisés, 21 blocs opératoires de pointe, des unités de soins intensifs cardiaques, néonatales, pédiatriques et respiratoires, dotés d’équipements de pointe, de laboratoires sophistiqués et de diverses unités cliniques spécialisées. L’hôpital offre une attention personnelle, un diagnostic et un traitement médical. Une équipe de 3 400 médecins, chercheurs, professionnels de la santé, personnel infirmier et administratif, travaillent ensemble pour offrir un service professionnel à tous les patients. Le personnel offre des services médicaux de haut niveau, tout en fournissant à chaque patient des soins personnels, chaleureux et humains.

Partager :