Une fois le scrutin législatif achevé, le 9 avril, le chef de l’Etat israélien devra désigner le responsable chargé de former une nouvelle majorité parlementaire, d’au moins 61 membres. Par Piotr Smolar pour Le Monde.

Lorsque les élections législatives israéliennes du mardi 9 avril auront livré leur verdict, le président Réouven Rivlin entrera dans la lumière. Il reviendra à cet homme cultivé, empathique, aux convictions très ancrées à droite, épris de lectures et de références bibliques, de désigner celui qui s’évertuera à constituer une nouvelle majorité pour gouverner le pays.

Agé de 79 ans, le chef de l’Etat est issu d’une famille profondément enracinée à Jérusalem. Il occupe sa fonction, largement honorifique, depuis 2014, lorsqu’il avait succédé à Shimon Pérès. Benyamin Nétanyahou, pourtant membre comme lui du Likoud, avait tenté d’empêcher sa désignation. Voici Réouven Rivlin en mesure de peser sur l’avenir politique du premier ministre sortant, si le résultat s’avérait serré.
Entre les deux dirigeants, l’inimitié est profonde. Elle porte davantage sur le style de gouvernement, l’éthique personnelle et les formules employées que sur les grandes orientations. Réouven Rivlin n’a jamais cru à un Etat palestinien. En revanche, il milite de longue date pour des relations respectueuses dans la société israélienne. (Copyrights : le Monde)
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Reuven « Ruby » Rivlin, né le à Jérusalem, est un homme d’État israélien, membre du Likoud et président de l’État d’Israël depuis le . Avocat de formation, il entame sa carrière politique dans les années 1970, et est élu député à la Knesset pour la première fois en 1988, sous les couleurs du Likoud, parti nationaliste situé à la droite de l’échiquier politique israélien.
Ministre des Communications entre 2001 et 2003, il est élu, cette même année, président de la Knesset ; à ce poste, il est critiqué par l’opposition qui lui reproche d’avoir brisé la traditionnelle neutralité politique de la deuxième charge de l’État hébreu en assumant des positions controversées. Candidat à l’élection présidentielle de 2007, il est devancé par Shimon Peres au premier tour et retire sa candidature. Deux ans plus tard, en 2009, il retrouve la présidence de la Knesset et redevient un personnage prépondérant de la scène politique israélienne.
En dépit de tensions avec le Premier ministre et chef du Likoud, Benyamin Netanyahou, il est en 2014 une nouvelle fois désigné candidat à la présidence de l’État d’Israël et est finalement élu. Issu d’une famille juive établie à Jérusalem depuis 1809, Reuven Rivlin est un descendant des disciples du Gaon de Vilna. Son père, Yosef Yael Rivlin, est en outre l’auteur de la première version hébraïque du Coran.
Après avoir accompli son service militaire et étudié le droit à la faculté de l’université hébraïque de Jérusalem, dont il est sorti diplômé, Reuven Rivlin sert comme major dans l’armée, puis devient avocat. Durant cette période, il rencontre Nechma Shulman, une étudiante en biologie née en 1945, qu’il épouse en 1970 ; de leur union naissent quatre enfants.
Avant d’entrer en politique, Rivlin a occupé les fonctions de conseiller juridique de l’association sportive Beitar Jerusalem, responsable d’une équipe de football. Il a, par ailleurs, été membre du conseil municipal de Jérusalem ainsi que des conseils d’administration du théâtre Kan et du Musée d’Israël. Il est végétarien depuis les années 1960.
Élu membre du conseil municipal de la ville de Jérusalem en 1978, il est élu député à la Knesset, le Parlement israélien, en 1988. La même année, il est désigné président du Likoud, parti de droite, et conserve ce titre durant cinq ans, jusqu’en 1993, un an après avoir été vaincu lors des élections législatives.
Il est néanmoins réélu député en 1996. Trois ans plus tard, il conserve son mandat parlementaire après des élections législatives anticipées. Nommé ministre des Communications dans le gouvernement d’Ariel Sharon en 2001, il se démet de ses fonctions moins de deux ans plus tard quand, le , il est désigné président de la Knesset, après les élections législatives.
Deuxième personnage de l’État d’Israël après le président Moshe Katsav, il sort plusieurs fois de la réserve liée à sa fonction pour critiquer sévèrement la politique de désengagement menée par Sharon. Les rapports entre le président de la Knesset et le chef du gouvernement seront de plus en plus tendus tout au long de la législature. Le , il perd la présidence des travaux de la Knesset, qu’il doit laisser à la députée centriste Dalia Itzik.
Convoitant de longue date la présidence de l’État d’Israël, dépourvue de pouvoir exécutif mais assurant à celui qui l’occupe un réel prestige, Reuven Rivlin se déclare candidat à l’élection présidentielle du . Le prochain chef de l’État doit rendre à la fonction présidentielle toute sa dignité, puisque que le sortant Moshe Katsav a été suspendu de ses fonctions après des accusations de viol à son encontre.
Présenté comme un candidat sérieux, Reuven Rivlin paraît en mesure de l’emporter face à l’ancien Premier ministre Shimon Peres, dont la candidature est dénigrée par la presse israélienne et une partie de l’échiquier politique. Pourtant, le jour du scrutin, Rivlin ne recueille que 37 voix à l’issue du premier tour, loin derrière Peres qui, lui, en obtient 58. Considéré comme défait d’avance, Rivlin a finalement décidé de retirer sa candidature, et l’élection de Peres paraissait acquise.

Deuxième présidence de la Knesset

Le , les députés de la Knesset élisent leur président, et c’est une fois encore Reuven Rivlin qui est désigné par ses pairs, avec une large majorité de 90 voix sur 120 votants. Ayant promis à l’opposition de présider les débats de la chambre de manière impartiale et juste, Rivlin entre régulièrement en conflit avec le Premier ministre et chef du Likoud, Benyamin Netanyahou. Les deux hommes ne s’apprécient pas, et le chef du gouvernement aurait tenté d’empêcher l’élection de Rivlin à la tribune présidentielle de la Knesset.
Le , il provoque une polémique après avoir dit qu’il lui paraissait « préférable d’accepter les Palestiniens comme des citoyens israéliens plutôt que de diviser Israël et la Cisjordanie dans une solution de paix future à deux États ». L’opinion publique s’émeut de ces propos, ce qui fait dire à Rivlin que sa déclaration n’était peut-être pas comprise dans le contexte approprié.
En juin 2010, il s’est retrouvé au centre d’une polémique après avoir ignoré les conseils d’un comité qui a recommandé l’annulation du mandat de la députée arabe Haneen Zoabi pour avoir participé à la flottille de Gaza quelques semaines plus tôt. Cette ignorance est fermement condamnée par de nombreux députés de droite et d’extrême droite, mais les libéraux israéliens et étrangers louent alors l’impartialité de Rivlin ainsi que son courage à défendre la démocratie israélienne10.
Il a été en 2010 l’un des rares hommes politiques à refuser la création d’un État palestinien, préférant un État unique de la Mer au Jourdain, avec une stricte égalité des droits entre Juifs et Arabes. À ceux qui lui rétorquent que les Juifs risquent d’y être minoritaires, il répond qu’avoir peur de vivre en harmonie avec les Arabes est la racine du racisme. La séparation des deux peuples dans des États distincts n’apporterait pas la sécurité à Israël, mais au contraire de plus grands dangers que la construction d’une société commune. Rivlin, sur cette base, considère que toutes les adaptations peuvent être envisagées afin d’obtenir la solution optimale pour que vivent ensemble Juifs et Arabes.
Il admet toutefois que lors même tous les États arabes admettraient le droit des Juifs à l’autodétermination, le fondamentalisme islamique qui nie ce droit aux Juifs restera un problème majeur même en cas de paix. En octobre 2014, Rivlin effectue une visite officielle au village arabe israélien de Kafr Qassem où il déclare « les Arabes israéliens sont le sang et la chair d’Israël ».
S’adressant aux dirigeants des « Amis internationaux de Givat Haviva » (le Centre pour une société partagée), qui lui remettait au mois de mai 2015 un prix récompensant son travail sur la co-existence, Reuven Rivlin a appelé tous les camps politiques en Israël à défendre la cause de la réconciliation, insistant sur le fait que l’avenir du pays dépendait d’une « identité israélienne partagée » judéo-arabe ; il reconnaît les Arabes comme « partie intégrante de cette terre » au sein de laquelle ils doivent vivre dans la stricte égalité sociale et culturelle avec les Juifs. Ils invitent les Arabes à maîtriser à la perfection l’hébreu et les Juifs à apprendre, dès la première année de scolarité, l’arabe.
 
 

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