EDITORIAL. Je passe de plus en plus souvent prendre mon café (et plus!) chez Bagelstein à Paris. La dernière fois j’ai déclaré, le coeur serré, au serveur (très sympathique) : « Je prends mon café chez vous par solidarité ». Il me regarde stupéfait. Etais-je sérieux? Je lui ai raconté un bref extrait de ma vie. La larme à l’oeil, il m’a remercié chaleureusement. En Israël, depuis des années j’ai adopté ce leit motiv : « Lo Nafsik lirkod » (« Nous n’arrêterons pas de danser »). Mon soutien est total à Gilles Abecassis et ses équipes. Mangez Bagelstein! C’est bon pour la santé. (Dr Daniel Rouach)
DANS LA REVUE L’ARCHE (1) . Une inscription antisémite a été découverte sur la vitrine d’un restaurant Bagelstein de l’Île de la Cité à Paris au mois de février par un riverain ayant partagé le délit sur son compte Facebook : la photo montre le mot « Juden » étalé à la peinture jaune sur la devanture de l’enseigne de restauration. Les gérants du restaurant ont déposé plainte, a annoncé le cofondateur de la chaîne, Gilles Abecassis.
Si à cette heure aucun élément ne permet de préciser par qui et dans quelles conditions exactes ce passage à l’acte a été commis, plusieurs voix se sont élevées pour dénoncer « le spectre de l’antisémitisme » planant sur le mouvement des gilets jaunes.
Dimanche 3 février, le Consistoire israélite du Bas-Rhin avait déjà notamment exprimé sa « forte émotion » après « les propos antisémites violents proférés » lors de l’acte XII des gilets jaunes à Strasbourg. Des propos tenus « devant la Synagogue et à l’encontre de citoyens juifs célébrant le Shabbat, fête hebdomadaire de repos et de Paix« , avait-il déclaré dans un communiqué.
Le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner s’est exprimé dans la journée sur Twitter suite au partage massif de la photo du magasin Bagelstein souillé sur les réseaux sociaux  : « Un tag antisémite en plein Paris. Un de trop. « Juden » en lettres jaunes, comme si les plus tragiques leçons de l’Histoire n’éclairaient plus les consciences. Notre réponse : tout faire pour que l’auteur de cette ignominie soit condamné. Notre honneur : ne rien laisser passer. »
Le CRIF a également réagit : « Indignation et colère après la découverte hier d’un tag antisémite ignoble sur la vitrine d’une boutique Bagelstein. Un acte qui rappelle les heures les plus sombres de l’Histoire. »
D’autres organisations telles la LICRA ou encore l’UEJF se sont exprimées  : « Aujourd’hui dans les rues de Paris. Le mot « Juden » taggué sur la devanture d’un restaurant #Bagelstein. Cet acte XIII est dans la suite des précédents : attaques contre les institutions, actes antisémites… Jusqu’à quand ? #ActeXIII#Giletsjaunes2019″, a écrit l’Union des Etudiants Juifs de France. 
L’auteur Joan Sfar a quant à lui publié un long texte sur sa page Facebook mettant directement en cause la mouvance des gilets jaunes et dénonçant une « culture de l’excuse » ne s’étant « jamais aussi bien portée« . « Celui qui a choisi d’écrire « JUIF » en allemand sur cette boutique sait très bien qu’il pense aux vitrines de la nuit de cristal », poursuit-il  :
« Je garde un silence de tombe depuis cette histoire de gilets jaunes. Car je sais ce qu’on va me répondre. C’est bizarre ce moment où l’on se dit qu’il est inutile de parler. On ne parvient même pas à se souvenir du nombre de banderoles ou cris ou graffitis antijuifs qui ont explosé depuis le début du mouvement. Jamais une formation ou un syndicat n’a aussi unanimement refusé de réprouver de tels débordements. Il y aurait eu de tels graffitis antisémites à un défilé de n’importe quel grand parti ou syndicat, ça aurait fait un scandale justifié. Même à un défilé du Front National, ils auraient eu trois procès et Marine Le Pen aurait exclu du monde!!! Ici, non. Ici, personne n’a rien vu, n’y est pour rien, n’en pense rien. Jamais la culture de l’excuse ne s’est aussi bien portée. Personne n’est représentant ni responsable ni comptable de rien. Je suis davantage inquiet par la multitude qui se satisfait de telles explications que par les quelques ordures qui tiennent effectivement la bombe de peinture. Et cette légende qui a cours en ce moment, selon laquelle la colère de la foule serait un moment sacré qui ne débouche que sur du vrai, du bien et du beau! La foule a accompagné sans coup férir tous les changements de régimes, des plus bénéfiques aux pires. Le peuple, oui, c’est une notion que je comprends et que je respecte.
Le peuple français, ce sont soixante millions de personnes. La foule, c’est autre chose, c’est une occasion, aussi, de montrer ce qu’on a de plus laid. Cette idée que l’on est légitime dès lors qu’on est violent, et qu’on a raison puisqu’on souffre, ce fut le combustible des pires meurtres du siècle passé. On se dit sans doute que les garde-fous ont sauté, une génération plus jeune est là, qui a oublié, ou qu’on manipule plus facilement. Soyez certains que ceux qui jouent avec votre haine et votre désespoir n’ont rien oublié.
Celui qui a choisi d’écrire « JUIF » en allemand sur cette boutique sait très bien qu’il pense aux vitrines de la nuit de cristal. Il faut se taire, je crois, parce que plus personne n’a envie d’entendre.N’importe quelle alerte grave ne débouche aujourd’hui que sur une controverse twitter. La culpabilité sociale est telle sur nos chaines de télé et chez les commentateurs que n’importe quelle réaction sensée face à ces dérives passe pour un soutien au gouvernement Macron. Oui, on a le droit d’être en opposition totale avec de nombreuses décisions du gouvernement actuel tout en ne trouvant aucune excuse à ceux et celles qui utilisent le désespoir des gens pour attiser, une fois encore, la haine raciale, le fantasme sur le juif, sur le franc-maçon, prétenduement tous riches et puissants bien entendu, ou la haine de l’immigré. Tout ça, c’est inacceptable. Je ne comprends pas ceux qui participent à ces manifestations et choisissent depuis le début de ce mouvement de minimiser son contenu raciste et antisémite. ce n’est pas un ou dix, ce sont des centaines de graffitis ou de tweets anti-juifs depuis le début de cette histoire. Et il faut encore subir les durs d’oreille qui m’expliquent que ce n’est pas représentatif.
Pas représentatif? C’est une constante depuis les origines de ce mouvement. Ce qui est représentatif, c’est la lâcheté de ceux qui regardent ailleurs, y compris parmi les commentateurs, trop contents de s’acheter une caution peuple. L’écrivain installé, le comique ou le comédien qui en fait des caisses sur « nous le peuple », en général il fait silence radio sur ces graffitis. Vous en avez pas marre de cette constante du « ces éléments ne sont pas représentatifs du mouvement »? ce qui est représentatif, ce sont tous ces gens qui regardent ailleurs quand on écrit « JUDEN » sur une vitrine.
A croire que le connard qui taguait a fait ça à quatre heures du matin et pas pendant une manif noire de monde. Moi je ne pourrais pas faire UN PAS dans la rue aux côtés d’une clique qui ne loupe jamais une occasion de s’en prendre un coup aux migrants, un coup aux juifs, un coup aux francs maçons. Tous ceux que « ça ne dérange pas », ou qui « considèrent que le peuple a des choses à dire et tant pis si ça fait pas plaisir », vous avez un sacré mépris pour le peuple! Si vous croyez que le peuple, ce sont ces ordures, vous avez une bien basse idée du peuple français. »
Aline Le Bail-Resemer
https://larchemag.fr/
 
 
Partager :